Des gouttes d’eau frappent les vitres de l’automobile dans lequel je suis assis. Ils suivent les courbes de la tôle pour ensuite retomber sur l’asphalte froide. Je les observe, je les ausculte, je les regarde avec attention…Rien de tout cela. Je fixe l’extérieur de mon habitacle. Mes yeux sont vides, car mon esprit est ailleurs. Ils sont rouges.
Le conducteur arrête le véhicule devant une bâtisse blanche. Je prends une inspiration se voulant profonde, mais l’air entrant dans mes poumons force des larmes. J’appose mes lunettes sur mon nez irrité. Je prends quelques secondes pour moi, pour m’encourager. Les mots de ma raison apparaissent difficilement aux entrailles de mes émotions. Puis j’ouvre la porte, mon bras prend une fraction de seconde pour être mouillé par la pluie. Je sors ma tête, puis mon corps suit. J’échange une heure pour que mon ami revienne me chercher de cet endroit qui me fait trembler…
Je marche à petits pas, même si l’eau transperce déjà mes vêtements. Je me dirige vers la porte, les battements du cœur me résonnant dans le crâne, mes mains crispées, les gouttes glissant le long de ma peau, les pupilles noyées…J’entre. Un homme est là. Il m’accueille, et m’indique l’emplacement. Je le remercie d’un signe de tête. Le couloir semble parcouru d’épines de roses, m’égratignant les pieds de douleur. J’ose atteindre le fond, puis me tourner vers ce lieu qui m’attend.
Les gens sont habillés d’un noir de jais, d’un chic qui ne les ressemblent pas. Je reconnais leur visage, et une révolte s’empare de mon corps, et je voudrais crier ma hargne à leur crever les tympans. Toutefois, une sagesse qui m’est inconnu s’empare dans ma colère et calme mes pulsions d’agressivité. Ils s’attendent à ce que je leur offre des mots de politesse, mais je marche devant eux, ne les regardant pas. Ces gens cependant me suivent de leurs yeux faussement attristés. Ils me jugent.
Tu es là. Enfoncé dans des draps. Je cours à ta rencontre. Je m’arrête devant toi, mon corps frémissant de partout. Tes yeux fermés et ta bouche inerte…Des sanglots s’échappent et se déversent sur ton visage emprunt autrefois de tendresse, de joies, d’amour. Je hurle : «Non!» Puis je m’effondre sur ton corps sans vie. Les autres gens, troublés, me regardent, puis j’entends : «C’est donc toi.» Cette phrase remplie de haine m’écrase encore plus. Un homme s’approche de moi d’un pas décidé, une femme pleure à chaudes larmes, une jeune fille est sans mots et le jeune homme lance un regard de mépris vers moi. Le premier me soulève, me fixe d’un grand courroux et me gifle sur la joue. Puis il me délaisse sur le sol. Une force me redonne vie. Je me relève, puis je crie à sa famille : «Oui, nous nous aimions!»
Je m’enfuis de ces funérailles, le cœur détruit, l’âme en deuil. Je me couche sur le trottoir. Et je pleure sans arrêter. Le temps se casse, mon amant est mort.
Un papier mouillé sur le plancher bétonné me frôle le visage. Il y est écrit : «Adolescent battu à mort : Acte homophobe ?»
Je me lève d’un bond et me lance dans la rue, et…métal sur mon corps. Mes os se fracturent. Je retombe. J’entends le conducteur qui échappe l’effroi. Je m’évanouis…
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